mercredi 25 septembre 2019
LE DERNIER COMBAT DE BEN-AMAR LE CHASSEUR DES LIONS DE SOUK AHRAS
Ben-Amar cet intrépide chasseur des lions avait toujours peur des lionnes. Il avait toujours dit que mourir avec les griffes d'une lionne est un honneur que les lions ne pouvaient lui offrir . Ainsi le héroïque Ben-Amar a fini sa vie, tué par une féroce lionne de Souk Ahras.
Voici le récit de son dernier combat raconté par un témoin européen Charles Plémeur dans son fameux livre , Le lion Désappointé.
Ben-Amar gravissait en pleinjour une petite montagne toutecouverte d'épaisses broussailles, lorsqu'à trente pas de lui, il aperçutune lionne entourée de quatre lionceaux assez forts.
Résolu etrapide comme la foudre, il viseaussitôt sa lionne, la frappe d'uneballe qui lui traverse l'épaule. Les lionceaux effarés se sauvent, leur mère s'enfuit d'un autre côté. Mais, selon son habitude, le Négro avait promptement rechargé son arme etétait arrivé à temps pour couper à la lionne le passage du sentierqu'elle suivait, en laissant sur sestraces une traînée de sang. A cinqpas d'elle, il tira un second coupde fusil, qui lui traversa le cou.
Rugissante, elle bondit sur Ben- Amar, qui tomba et roula sur son poitrail. L'intrépide Amar, à terre, ne perdit pas la tramontane; ilsortit un couteau de sa gaîne fixéeà sa ceinture, et chercha à poignarder la lionne; mais n'ayant pas assez de jeu, son couteau glissait sur le poil de son ennemie.Ben-Amar appartenait sans défense possible à la fureur de lalionne, qui le traîna au bord d'un profond ravin et le lâcha sur la pente de l'abîme. Ben-Amar s'accrocha à quelques touffes d'alfa,en serrant convulsivement dans samain le couteau qui jusque-là lui avait été inutile. La lionne s'assit en rugissant devant lui comme pourle narguer. Amar répliqua à ses rugissements par les plus outrageantes épithètes qu'il put trouver dans son répertoire, la taxant de lâcheté et de félonie, si bien que la lionne se jeta sur Amar, lui enveloppa la tête dans son haïk, et fit disparaître tête et haïk dans sa mâchoire. Amar labourait inutilement d'inoffensifs coups de couteau les flancs de son ennemie. La lionne, après avoir donné un coupde gueule au dur crâne d'Ahmed.— qui conservera toujours sur soncrâne la glorieuse couronne creusée par les dents de la lionne, —lâcha la tête du chasseur, le reprit avec ses griffes à la cuisse, et le tint ainsi suspendu au-dessus de l'abîme. Par un mouvement énergique, dont est seul capable un homme de sa force musculaire, Ben-Amar, réunissant tous ses efforts dans ce danger suprême, se redressaet plongea son couteau dans lagorge de la lionne, qui s'abattit etrâla. Ben-Amar tomba mourant àcôté d'elle; le sang coulait abondamment de ses cinq ou six blessures. Il perdit connaissance.» Concevez-vous un plus glorieux spectacle de la puissance humaine que cet Arabe, évanoui sur la limite d'un abîme, aux côtésdu terrible animal que son héroïsmea vaincu?» Revenu à lui, Ben-Amar, ensanglanté, eut le courage de setraîner sur ses pieds et sur ses mainsjusqu'à un douar, d'où il fut tranaporté à Souk-Arras. C'est à peines'il avait figure d'homme. Lescoups de griffe et les coups de la gueule de la lionne l'avaient mutilé. On fut obligé de lui extrairedeux petits os fracturés du brasdroit.son crâne était percé et les quarante francs que le bureau arabe lui donna, enrecevant le corps de la lionne,suffirent à peine à payer ses médicaments.» L'intrépide Arabe a tué la plupart de ses trente-neuf lions à laface du soleil, sans se servir d'aucun appât ni employer aucune ruse,armé d'un couteau et d'un fusil, en poussant droit sur les fauves.
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